Exclusivité Tolkiendrim – Interview de Sir Ian McKellen

Découvrez l’interview de Sir Ian McKellen (Gandalf), réalisée lors du passage de Benjamin sur le tournage du film Le Hobbit  !

Sir McKellen
Crédit photo : Warner Bros.

 

Sir McKellen prend place sur la chaise face à nous. L’homme prend visiblement plaisir à répondre à nos questions et ce même après une journée fatigante et longue.

 

Après Le Seigneur des Anneaux, pensiez-vous un jour jouer à nouveau ce personnage ?

Sir Ian McKellen : – Non, je ne pense pas. Bien sûr, il y avait des blagues tout le temps sur le Seigneur des Anneaux, qui a duré… combien ? deux ans et demi en tout ? Nous nous disions alors : « Oh, et bien sûr, nous allons faire le Hobbit après » et ça faisait rire Peter. Quelques années plus tard, nous avons entendu : « Oh, peut-être qu’ils vont le faire. ». Mais ils devaient obtenir les droits, ce qui a pris du temps. Alors cela s’est fait par étapes, et progressivement j’ai réalisé que ça allait probablement arriver.

 

Vous demandiez-vous si vous alliez y participer ?

Sir Ian McKellen : – Oui. Eh bien, j’ai passé deux ans et demi sur ce film. Mais comme je le disais, le projet avançait, puis s’interrompait, avançait, et s’interrompait de nouveau. Et quand Guillermo del Toro a été choisi pour réaliser le film, cela a prit une orientation différente, et j’ai pensé que cela pourrait être très agréable de travailler avec lui. J’étais en tournée, avec la pièce “Le Roi Lear”, ou celle “En attendant Godot”, je ne me souviens plus laquelle, et c’est là que j’ai rencontré Guillermo, ici, juste en bas de la côte, dans la maison qu’il a acheté. Il m’a dit qu’il voulait que je reprenne le rôle. Il n’y a pas eu à choisir, j’ai dit oui. Nous avons discuté des scripts durant neuf mois, et puis il a quitté le projet.

Peter devait alors le reprendre. Et ensuite il l’a arrété, puis reprit de nouveau , et encore suspendu. Un jour, Peter m’a envoyé un bel email, très agréable, le jour même où il a annoncé qu’il ne serait pas le réalisateur. Il me disait qu’il ne pouvait pas imaginer quelqu’un d’autre pour interpréter Gandalf, et que bien sûr je devais le faire. Il ne voulait pas que je me sente redevable, il n’y avait rien à y faire, il ne réaliserait pas le film. Je crois que deux ans plus tard, le film était encore incertain, et je m’étais fait à l’idée qu’il ne se ferait jamais.

Au moment où l’offre est arrivée, je m’étais fabriqué toutes sortes de raisons pour lesquelles peu m’importait si le film ne se produisait pas, en fin de compte.  Il y avait donc pour moi un véritable choix à faire, J’avais de réelles bonnes raisons de ne pas partir loin de chez moi pour une si longue période, je ne voulais pas nécessairement reprendre le rôle. Et puis un ami m’a dit:  “Ian, tu dois le faire pour tous ces enfants qui veulent te voir en Gandalf à nouveau. Arrête d’être si égoïste”. Ça a été l’argument décisif, vraiment. Bien sûr, j’avais aussi beaucoup de raisons pour lesquelles je tenais à le faire. J’aime la Nouvelle-Zélande, j’aime travailler avec Peter et j’aime le rôle, bien sûr. Je ne voulais personne d’autre pour l’incarner.

 

La scène de la bataille de ce matin semble avoir été épuisante.  Est-ce la même chose que vous ressentez après tant d’années à interpréter Gandalf ?

Sir Ian McKellen : – Non, non. Enfin, bien sûr je suis plus vieux que lorsque nous avons tourné Le Seigneur des Anneaux. Je me souviens avoir rencontré Christopher Lee, qui jouait Saroumane et je me disais : « Oh, c’est un très vieil homme, vraiment, j’espère qu’il tiendra jusqu’à la fin du film. » Et me voilà maintenant, pas loin de l’âge qu’il avait à l’époque. Alors, je crois que j’ai le droit de me sentir fatigué, et désormais je le suis effectivement à la fin de la journée.

Je vois les plus jeunes faire les scènes, encore et encore, et soulever différentes choses. Ça vous rappelle constamment tout ce que vous étiez capable de faire avant mais qu’aujourd’hui vous ne pouvez plus. Mais bon, en même temps c’est aussi très revigorant. Ne vous inquiétez pas trop pour les acteurs, ils y arrivent très bien. Ce n’est pas vraiment un travail difficile. Vous vous levez tôt le matin, mais on s’occupe tellement bien de vous.

 

Vous sentez vous responsable d’encadrer les jeunes acteurs sur le plateau, d’être un mentor pour eux ?

Sir Ian McKellen : – Oh non, pas du tout. Non, j’ai appris ma leçon lors d’une précédente occasion. Pas sur ce film, mais il y a eu une fois où j’ai pensé que je pourrais aider les gens à gagner du temps sur des problèmes qu’ils rencontraient, et que j’avais moi même connus, en partageant mon expérience  avec eux. Cela n’a pas toujours été très bien accueilli.

Donc généralement je ne vais pas à eux, non, c’est l’inverse. Je regarde ces jeunes et je me dis « comment font-ils pour jouer si bien ? » et j’essaie de trouver comment ils font. Martin Freeman est un superbe acteur, il est beaucoup plus jeune que moi et il en sait beaucoup plus sur ce métier, que lorsque j’avais son âge. Il a de l’expérience. L’un des bons côté d’être acteur c’est que vous êtes amené à travailler avec des personnes de tous âges. Nous sommes tous égaux, vraiment, nous sommes tous les mêmes. Et souvent, le jeune joue le rôle principal, et il est donc de votre devoir de vous faire le plus discret possible.

 

Une fois le tournage terminé, votre personnage va-t-il vous manquer ou est-ce plutôt un soulagement ?

Sir Ian McKellen : – C’est un soulagement. J’en ai assez fait. Mais je ne quitterai jamais Gandalf, car partout où je vais il y a des gens qui veulent me dire bonjour. C’est la raison pour laquelle ces treize années qui viennent de s’écouler, je les ai vécu comme un prolongement.  Il est très inhabituel pour moi d’être associé à un personnage que les gens veulent rencontrer, et avec qui ils veulent parler. Heureusement, ils ont un peu peur de Gandalf, ils ne sont pas tout à fait sûrs de ce qu’il pourrait leur faire. Je ne suis pas l’ami, le copain, ils sont très respectueux.

C’est la même chose avec mon personnage de Magneto dans X-Men. Il est plutôt dominant, donc je ne suis pas trop dérangé par les fans. Mais néanmoins ils sont là, et ils font partie de ma vie, peu importe où je vais dans le monde. Ce sera toujours le cas, je suppose, pour le reste de ma vie. Mais ça ne me dérange pas. C’est une bonne chose, que d’être associé à Gandalf.

 

Merci pour tout ce que vous avez fait pour Le Seigneur des Anneaux et Bilbo le Hobbit. C’est un réel plaisir, Ian, de vous voir.

Sir Ian McKellen : – Mais vous savez, qui se souvient maintenant que Dumbledore n’a pas toujours joué par Mike Gambon ? Donc, si John Hurt était venu ou Mike Gambon, Il pourrait venir avec son maquillage de Dumbledore, c’est exactement le même que celui de Gandalf. En fait, je l’accuse d’essayer de me ressembler.

 

J’ai entendu dire que certaines personnes vous confondaient, et pensaient que vous étiez Dumbledore. Ils vous auraient demandé des autographes et vous auriez signé “ Dumbledore ”. Et que lorsque les gens le prennent pour Gandalf, il signe  “ Gandalf ” !?

Sir Ian McKellen : – Il a signé « Ian McKellen ». Mais non, ce serait exagérer, moi je ne pourrais pas signer « Mike Gambon »…  je ne suis pas sûr de l’orthographe ! (Rires)

 

Pour la nouvelle génération vous êtes Gandalf ou Magneto. C’est peut-être la partie la plus importante de votre carrière d’un point de vue renommée mondiale. Comment ressentez-vous cela ?

Sir Ian McKellen : – Eh bien, je sais qu’Alec Guinness, qui incarnait le vieux guerrier Jedi Obi-Wan Kenobi dans Star Wars, n’aimait pas que la pluspart des gens ne le reconnaissent qu’à travers ce personnage et rien d’autre, malgré sa très longue et distinguée carrière au cinéma et au théâtre. Je pense que mes rôles ont été mieux reconnu que les siens.

Cela ne me dérange pas d’être associé à Gandalf. Il y a encore beaucoup de gens que je rencontre qui n’ont jamais vu Le Seigneur des Anneaux mais qui ont vu d’autres choses que j’ai fait. C’est bien ! S’il s’agissait d’une série de films très mauvais, si je jouais un personnage que je n’avais pas vraiment approuvé, si les films n’avaient pas eu beaucoup de succès et que j’étais coincé avec cette étiquette, ça pourrait être un peu agaçant, mais on ne peut pas se plaindre. Pour un acteur, faire son travail et être payé, c’est à peu près le maximum qu’on puisse attendre, le reste est un bonus, ça n’a rien d’une préoccupation, vraiment.

 

Que pensez-vous de Tolkien en tant qu’écrivain ?

Sir Ian McKellen : – Je suis un fan de la façon dont il écrit, pas toujours à propos de ce qu’il écrit. Il est capable de décrire une scène, le temps qu’il fait, ou à quoi ressemble un lieu, en une centaine de mots, que Peter Jackson et toute son armée de designers mettront des années à préparer afin d’être en mesure d’en écrire le script. Mais Tolkien est si précis et si évocateur. Si vous deviez le décrire comme le grand écrivain qu’il est, ce serait deux des qualités que je proposerais.

 

Il y a beaucoup de technologie derrière les films, de nos jours. A-t-elle changée la façon d’interpréter un personnage aujourd’hui ?

Sir Ian McKellen : – C’est très embêtant d’être grand dans ce film, d’être plus grand que certains personnages principaux. Je n’ai pas vraiment tourné avec Elijah Wood, mais souvent avec Kiran (doublure petite taille d’Elija Wood. Ndlr) qui jouait avec un masque. Mais ils ont affiné cela, bien que la technologie devienne plus compliquée. C’est maintenant plus facile pour le département des effets spéciaux qui gère les dimensions, les échelles, mais ce n’est pas encore l’idéal. Tous ces écrans verts ne me dérangent pas du tout, je suis habitué à jouer au théâtre, et vous savez, Macbeth n’est pas dans un vrai château Jusqu’à ce qu’il le dise.  

Pour moi, le décors n’est pas très important, mais l’écran vert en général n’est pas beaucoup utilisé. Lorsque vous voyez Gandalf et le reste de la compagnie sur la montagne, nous y étions. Nous sommes allés là-bas. Il peut y avoir des scènes supplémentaires, des gros plans qui sont ensuite fait ici, ou en studio, avec un écran vert et les images projetées des vraies montagnes.  mais nous étions dans les vraies montagnes. Nous sommes allés dans tous les endroits que vous voyez. Ils ont juste été peaufinés, de façon à ce qu’ils soient un peu différents et c’est passionnant. Il n’y a rien de mieux que de marcher le long d’une montagne parce que vous n’avez pas à jouer la comédie, vous devez juste faire attention là où vous mettez les pieds, tout comme Gandalf le ferait. Cela vous enlève beaucoup de pression.

Alors oui, la technologie est présente, mais la 3D n’a aucune importance pour les acteurs, nous ne la remarquons même pas. Mais nul doute que, sans cette technologie, ces films en particuliers n’auraient jamais été réalisés. Alors nous devons lui en être reconnaissants.

 

J’ai lu une fois vous vous plaigniez de votre personnage, à propos de la taille de votre nez ?

Sir Ian McKellen : – Je pensais qu’il avait grossit et en fait non. Il est légèrement différent pour cette série de films, je ne sais pas pourquoi, légèrement… Non, mais on ne peut pas se plaindre, parce que dans ce film tout le monde porte une perruque, l’ensemble des personnages principaux et beaucoup de figurants portent des perruques. Rien n’a été écrit à ce propos. C’est incroyable de voir le nombre de perruques qu’il y a.  Et tout le monde a au moins une prothèse de quelque chose, oreilles, mains ou pieds… Dans mon cas c’est un nez, et pour les nains c’est un masque complet.

On est plutôt dans le monde du théâtre que dans celui du cinéma, vous savez. Au cinéma vous pensez : « c’est du réel. » mais ce n’est pas le cas, vous obtenez quelque chose de prétendument réaliste, comme ça l’est au théâtre, n’est ce pas ? Maintenant, j’ai beaucoup de chance. Les nains doivent être ici à trois heures et demie du matin, moi je ne viens qu’à partir de sept heures et demie. Donc, je ne râle pas. Le magnifique look de Gandalf n’a rien à voir avec moi et j’en suis très reconnaissant.

 

Nous arrivons à la fin du voyage avec Le Hobbit et il est l’introduction de l’histoire du Seigneur des Anneaux. Comment décririez-vous à Frodo l’aventure de Bilbo le Hobbit ?

Sir Ian McKellen : – Mais je le fais, je la décris, lors de notre toute première rencontre dans La Communauté de l’Anneau. Oh, vous voulez parler sans doute de “cette petite histoire à propos du dragon“ ! Et bien,  je fais en sorte de ne pas trop en parler. Si vous envoyez un jeune garçon à la guerre, ne lui dites pas à quoi cela va ressembler. Parfois Je me demande s’il n’aurait pas mieux valu avoir tourné le Hobbit en premier. Mais il était important de faire Le Seigneur des Anneaux. C’est un grand livre. Et si nous parlons de littérature, c’est de la grande littérature.

Le Hobbit est très charmant, il est presque écrit à la première personne, c’est Tolkien racontant une histoire, « Il était une fois … » pour ainsi dire. Alors que Le Seigneur des Anneaux est une histoire du monde tel qu’il était dans un moment de grand péril, et ce monde ne peut être sauvé que par le plus petit de ses habitants qui ne rentrera jamais chez lui. Frodo ne rentre pas à la maison.

 

– Fin de l’interview –

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